*Tel Zorro au féminin...*

« Parce que la pluie frappait violemment contre le parapluie que me tenait une jeune femme -certainement une amie, je ne me rappelle plus de son visage. Parce que mon cœur battait tellement fort que son tambour me remontait jusqu'aux tempes. Parce que ma vision, troublée par les larmes et les gouttes du ciel, ne quittait plus la plaque de marbre sur laquelle était inscrite en jolies lettres d'or trois prénoms. Parce que j'étais dévorée par la haine et la colère...je n'entendais plus ce que racontait cet homme qui c'était voué à Dieu pour l'éternité, vêtu de sa robe blanche. Pourtant, tout se passa très vite. Peu à peu, quelques couples s'avançaient vers moi, les yeux plongés dans les graviers, avant de me lancer un "Toute mes condoléances" à peine audible, m'obligeant à serrer la mâchoire et à inspirer profondément, laissant les larmes couler le long de mes joues alors que mon visage ne faisait ressortir qu'une expression neutre. Et puis...plus rien. »

« Je vous saute le moment de ma vie le plus cruel, il n'y a rien d'intéressant à raconter. En gros, je me suis engouffré dans une grande dépression. Je n'avais plus le goût de continuer d'aller en cours, juste le goût de foutre ma vie en l'air. »

« Direction l'Espagne. Pourquoi? Parce que. Dès que j'étais arrivé là-bas, j'avais sentit un élan d'espoir au fond de moi, juste car je me sentais déboussolé. Exprès, je n'étais pas aller dans les grandes villes et encore moins dans la capitale. Non, je voulais me sentir seule au monde. Tout était si différent! De grandes étendues encerclé de fils barbelés où l'on pouvait voir paitre au loin des troupeaux de bêtes de corrida. J'essayais de me cacher le plus possible mais avec un orque si imposant, à quoi bon? Je crois que je suis restée un mois dans ce petit village. En un mois, j'avais appris les bases de l'espagnol, je m'étais habituée à leurs coutumes. Mais mon cœur n'existait plus. Il avait été trop longtemps rongé par le désespoir et chaque jour, je ne cessais de penser à eux. Dire que j'étais à présent seule, sans famille, avec sur ma carte bancaire des milliards de dollars dont j'avais hérité. Tout cela continuait d'hanter mes nuits. Et ce fut ce jour que ma vie allait basculer.
Alors que je rentrais dans un petit bar, je l'avais vu, lui. Il portait un chapeau semblable à celui d'un conquistador, la tête baissée je ne voyais pas son visage-, ainsi que des épeurons à ses bottes de cuir. Conquistador? Véritable Cow-boy. Sans oublier le petit singe qu'il portait sur l'épaule, tout aussi immobile que son maître. Et il avait simplement posé les yeux sur moi alors que son visage était toujours caché par l'ombre de son chapeau. Par méfiance, j'étais sortie du bar, marchand d'un pas précipité avec la crainte de me retourner. L'après-midi, je l'avais revu, comme si le destin voulait que nous nous rencontrions. Et c'est alors qu'assise près d'une fontaine, Requiem légèrement en retrait, il était venu m'accoster. »

__ Bonjour Satine.

« Il avait parlé d’une voix rauque qui se voulait chuchoteuse. Mais, au fait, comment connaissait-il mon prénom ? »

__ Comment me connaissez-vous ? Qui êtes vous ?!
__ Chut, señorita, même les pierres ont des oreilles. Suivez-moi.

« Quel étrange personnage ! Toujours méfiante, je le suivais néanmoins, l’observant tout en marchant derrière lui. Il était habillé d’un grand poncho uni, troué à quelques endroits, qui ne dévoilait que ses bottes et ses éperons d’argent. Eperons ? Il n’avait pourtant pas de canasson ? Nous nous engageâmes dans une petite ruelle, à l’abri des regards. Après quoi, il s’adossa contre le mur d’une maison, croisant ses bras sur son torse, la tête toujours baissée bers le bas comme s’il voulait me cacher son visage.

__ Vous avez un joli animal.
__ Répondez-moi !
__ Vous n’étiez pas si hargneuse auparavant. L’épreuve que vous avez traversée n’est pas encore gagnée.

« Sur-ce, je me retournais et marchait pour sortir de cette petite rue, certaine qu’il me rattraperait de toute façon. Pourtant, non. Il resta adossé contre son mur, dans la même position, lui certain que je ne m’en irais pas. Avant de franchir les deux pans de murs, je m’arrêtais sans me retourner pour autant. »

__ Très bien. Je me nomme Alejandro Cortez. Comme vous, j’ai un daemon qui m’appartient. Plutôt devrais-je dire que j’appartiens à un daemon. Quoi qu’il en soit, j’ai aussi un don. Je peux connaitre la vie entière d’une personne rien qu’en la regardant dans les yeux. Cela fait maintenant un mois que vous êtes arrivée, étrange que je ne vous ais pas encore croisé, avec un daemon si imposant. Votre blessure n’est pas encore refermée et ce n’est pas en fuyant la douleur qu’elle se refermera.
__ Que voulez-vous.
__ Je suis scientifique aussi. Je vous propose juste une nouvelle vie.
__ Une nouvelle vie ? Je peux très bien me débrouiller toute seule, merci !
__ Très bien. Adios señorita. Vous savez où me trouver.

« Il passait alors devant moi, déposant un bout de papier dans la main, tellement vite quand sortant de la ruelle, je ne le vis plus. Etait-il aussi homme invisible ? Je m’empressais de retourner chez moi. Et ce fut toute la nuit que je repensais à ses paroles. Une nouvelle vie… Le lendemain, j’avais pris une décision. Je m’étais rendue à l’adresse qu’il m’avait laissée sur le petit bout de papier. C’était une petite maison isolée du village. Avant même que j’eus le temps de toquer, il ouvrit la porte.

__ Entrez, je vous en pris.

« Il n’avait pas l’air le moins du monde étonné de ma visite. Il portait toujours son chapeau et ses bottes ainsi que son poncho qui lui couvrait le reste du corps. Sans qu’il m’en donne l’autorisation, je m’étais assis sur une chaise autour d’une petite table. Lui resta debout, le visage toujours dans l’ombre.

__ J’ai réfléchis et…
__ Je sais.
__ Ah…oui c’est vrai. Mais…
__ Et vous vous posez des questions. C’est normal. Je n’ai jamais vu une jeune femme autant dévoré par tous ses sentiments. De la haine, de la colère, de la tristesse…un joli mélange qui vous tue à petit feu. J’ai eus envie de vous aider, vous ne méritez pas une vie comme celle-ci. Ce que je vous propose, c’est de vous changer en une autre, en quelque sorte. Votre daemon ne sera plus un orque, votre don ne sera plus de le faire léviter. Votre physique risque de changer, tout dépendra. Il vous restera juste à changer d’identité et personne ne vous reconnaitra. Attention néanmoins, vos souvenirs seront toujours présents.
__ Quand est-ce qu’on commence ?
__ Quand vous le voulez, señorita.

« Il m’avait alors fait passer dans une petite salle toute blanche, totalement différente du style de la maison. Par la suite, il m’avait installé sur une sorte de petite table d’opération et moi, d’un mouvement de main, j’avais posé Requiem sur une table juste à côté. »

__ Vous ne sentirez rien, quand vous vous réveillerez, vous vous appellerez donc Elena De La Luuna, si c’est bien ce que vous voulez. Je ne peux pas contrôler l’image de votre daemon ni votre don. Le hasard… Prête ?
__Si, señor.
__ Adios Satine.

« Mes cils battirent trois ou quatre fois. En l’air, le plafond. Jusque là, tout était normal. Je me levais alors, touchant le tissu de la robe que je portais. C’était une robe espagnole, me couvrant les pieds, qui datait certainement du 19ème siècle, semblable à celle que portaient les filles d’aristocrates. Je ne savais pas si tout cela était fait exprès mais face à moi se trouvait un miroir. Mon visage était resté le même mais mes cheveux me retombait presque jusqu’au milieu du dos. Ils étaient juste liés avec un petit nœud de satin. Requiem… Courant vers la porte en soulevant ma robe pour ne pas me prendre les pieds dans le tissu, je sortais à l’extérieur, m’arrêtant net à la vu d’un étalon aussi noir que l’ébène, aux crins ondulant jusqu’au niveau de son épaule. Mon dieu, quel bête! Il atteignait peut-être les 1m75 au garrot...à dire vrai, cela me faisait peur d'admettre qu'il atteignait certainement les 1m80...bref, immense. Déjà que j'étais petite. Requ…Don Pedro. Je m’avançais vers lui, pieds nus, caressant d’une main son encolure musclée. »

*Et moi qui détestais les canassons…*
*Tu es magnifique.*
*Je te retourne le compliment…señorita*

__ Il a raison, vous êtes ravissante.

« Alejandro se trouvait derrière moi, toujours vêtu de son poncho, de ses bottes munies d’éperons et de son chapeau qui lui couvrait le visage.

__ Vous lisez aussi les pensées des daemons ?
__ Pas moi…elle.

« Il venait de montrer le petit singe toujours accroché à son épaule qui me regardait presque en souriant. »

__ Qu’allez-vous faire à présent ?
__ Recommencer ma vie…en Espagne.

« D’après ce qu’il m’avait dit, mon don avait un rapport avec le contrôle d’une certaine chose chez les autres. Il n’en savait pas plus. Il m’avait invité à rester manger mais j’avais refusé, j’avais beaucoup trop de chose à faire. Sur-ce, j’étais montée sur le dos de Don Pedro comme si j’avais fais ça toute ma vie avant de partir au galop à travers les plaines pour rejoindre…je ne sais trop quoi. La suite fut moins intéressante. Disons que, je ne sais pourquoi, j’avais appris à danser le Paso Doble et, chose encore plus étonnante, je m’étais inscrite dans un cours pour apprendre le maniement de l’épée. Tellement bien que ceux qui me connaissait ne m’appelaient plus qu’Elena De La Vega…et ça m’allait très bien de me sentir rien que quelques instants la femme de Zorro. Mais bientôt, l’appel du pays revint au grand galop. A présent, il fallait que je me reprenne en main. Et il n’y avait qu’une seule chose à faire…revenir à Lindwüen University. »